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Imagerie

Publié le  Lecture 16 mins

L’échographie Doppler en obstétrique au 2e et 3e trimestre – Un outil pour le dépistage, le diagnostic et la surveillance du retard de croissance intra-utérin

Sandra LE GARREC Sage-femme échographiste Centre Hospitalier Nord Deux-Sèvres

Quel Doppler ? Quand l’utiliser ? Comment l’interpréter ?

La principale cause de l’altération de la croissance chez un fœtus par ailleurs normal est le dysfonctionnement, ou insuffisance utéro-placentaire. L’échographie Doppler est alors un apport fonctionnel non invasif pour le dépistage, le diagnostic et la surveillance de ces retards de croissance intra-utérins (RCIU). Une croissance altérée est associée à un risque accru de mortalité et de morbidité périnatale avec une issue plus défavorable pour le nourrisson à long terme. Cet examen complémentaire va permettre une meilleure prise en charge de ces situations à risque. Il sera utilisé dans des circonstances précises et avec un objectif précis, car de cet examen va découler une prise en charge obstétricale adaptée : fréquence et type de surveillance, indication de déclenchement ou extraction…

Qu’est-ce que le Doppler ? L’effet Doppler correspond à une modification de fréquence de l’onde ultrasonore entre l’émission et la réception lorsque la distance entre l’émetteur et le récepteur varie au cours du temps. Ainsi, le faisceau ultrasonore est émis par la sonde de l’échographe a une fréquence donnée et est renvoyé par les éléments figurés du sang à une fréquence différente. C’est cette différence de fréquence qui va nous permettre de savoir dans quel sens et à quelle vitesse circulent les hématies. En pratique quotidienne, nous utilisons principalement le Doppler pulsé et le Doppler couleur. Le Doppler couleur permet souvent de localiser le flux à étudier et le Doppler pulsé permet, lui, d’effectuer le « tir » Doppler. C’est le spectre retranscrit par le Doppler pulsé que nous allons analyser ci-dessous. Le Doppler utérin ou Doppler des artères utérines (DAU) Les artères utérines naissent de l’artère iliaque interne et remontent latéralement le long du corps de l’utérus. Le Doppler utérin cherche à évaluer l’apport sanguin au niveau de l’utérus afin d’explorer la circulation utéro-placentaire. Il a pour but de dépister ou diagnostiquer les anomalies placentaires vasculaires qui peuvent être à l’origine de RCIU d’origine vasculaire maternelle. Physiopathologie La placentation est caractérisée par un processus d’invasion de la partie superficielle de l’utérus par les cellules du cytotrophoblaste extravilleux. Cette invasion trophoblastique est orientée vers les artères spiralées de l’utérus. Cette prolifération des cytotrophoblastes donne lieu à une première vague d’invasion de l’endomètre et des artères spiralées avant 12 semaines d’aménorrhée (SA). Une deuxième vague d’invasion survient vers 16 à 20 SA. Cela entraîne une disparition de la tunique musculaire lisse de la paroi artérielle et des cellules endothéliales maternelles. La tunique de l’artère devient alors atone et insensible aux éléments vasoactifs permettant une perfusion facilitée de la chambre intervilleuse. Ainsi, il y a une augmentation importante du débit sanguin en faveur du placenta. Si le processus d’invasion s’arrête, la deuxième vague d’invasion trophoblastique n’ayant pas lieu, les résistances périphériques sont conservées, laissant une circulation à haute résistance. Il y a alors une diminution de la vascularisation du lit placentaire par les artères utérines. Au premier trimestre de la grossesse, le DAU va permettre de dépister les populations à haut risque de complications vasculaires pour lesquelles l’instauration d’un traitement par aspirine aurait un intérêt bénéfique. Au deuxième et troisième trimestres, l’étude du DAU en population générale est décevante. Cependant, dans une population à haut risque, comme lors de la survenue d’une pré-éclampsie, elle permet de repérer les fœtus à haut risque de survenue de RCIU. Il a aussi un intérêt diagnostique dans le bilan étiologique d’un RCIU. Ainsi, on définit un spectre pathologique sur le Doppler des artères utérines par un index de résistance élevé et/ou la présence d’un notch (incisure proto-diatolique). Notons que le notch peut être physiologique jusqu’à 24-26 SA et qu’il est nécessaire de contrôler sa disparition. La particularité du Doppler utérin est qu’il existe 2 artères concernées. Ainsi, plusieurs critères permettent d’établir une échelle de gravité : Altération du Doppler uni- ou bilatéral, du côté placentaire ou opposé, avec un index élevé ou non et la présence de notch, ainsi que sa profondeur. Cette augmentation des résistances périphériques va donc pouvoir avoir des conséquences cliniques à type de RCIU par insuffisance placentaire. Cela n’est évidemment pas un argument diagnostique. Cependant, associé à l’étude des indices Doppler ombilical et cérébral, du volume amniotique, de l’examen clinique et biologique maternel, il permet de rechercher des arguments en faveur d’une origine placentaire. La technique de mesure Le recueil du signal Doppler est réalisé au niveau du tronc principal de l’artère utérine (qui correspond à la résultante des résistances des artères spiralées et arquées). L’artère utérine est facilement repérable grâce au mode Doppler couleur en temps réel car le tronc principal de l’artère utérine croise l’artère iliaque externe (qui chemine le long de l’isthme utérin) (figure 1). La mesure peut être réalisée par voie vaginale ou abdominale sur les 2 artères utérines sur au moins 3 cycles. En abdominal, la sonde est placée à 2 à 3 cm en dedans des épines iliaques antéro-supérieures, face orientée vers l’utérus. L’axe de tir doit être le plus possible dans l’alignement du flux sanguin, c’est-à-dire que le plus tangentiel possible à l’axe tir. Figure 1. Repérage du tronc principal de l’artère utérine en Doppler couleur par voie abdominale. Analyse du spectre L’analyse du spectre du Doppler pulsé de l’artère utérine pourra être effectuée de façon : Quantitative : avec les indices de résistance IR ou de pulsatilité IP. Pour comprendre ces indices, il faut décomposer le tracé de l’enregistrement Doppler (figure 2) : – S correspond à la systole cardiaque et traduit la puissance d’éjection – D correspond à la diastole cardiaque et traduit la résistance circulatoire. À partir de là, on va pouvoir calculer ces indices. Le plus fréquemment utilisé c’est l’index de résistance IR = S-D/S. Ce ratio nous donne un chiffre sans unité. Visuellement, plus la diastole est basse, plus l’index de résistance va être élevé. Le spectre en lui-même traduit des vitesses en cm.s-1. Figure 2. Représentation schématique d’un spectre Doppler pulsé normal dans une artère utérine. Qualitative : présence ou absence d’une incisure protodiastoloque appelée couramment notch (figure 3). Figure 3. Représentation schématique d’un notch sur un spectre Doppler pulsé dans une artère utérine. Spectre normal Le pic systolique présente une phase ascendante verticale, suivi d’une phase descendante rapide puis une deuxième phase descendante moins rapide. Pour que le spectre soit normal, il faut en général un flux résiduel en diastole d’environ 40 % (figure 4). Figure 4. Doppler de l’artère utérine : spectre normal. Spectre pathologique Quantitatif : Diminution de la diastole avec une augmentation de l’IR et de l’IP. Le spectre pathologique est caractérisé par une diminution de la diastole par rapport à la systole, le 95 e percentile correspondant à un IR= D/S à 22-24SA entre 35 et 40 % (figure 5). Figure 5. Doppler de l’artère utérine avec une diastole basse. Qualitatif : Existence d’une incisure protodiastolique, cassure au niveau du deuxième changement de pente révélant la persistance de l’élasticité de la paroi des vaisseaux et d’un reflux sanguin diastolique (figure 6). Figure 6. Doppler de l’artère utérine avec un notch et une diastole basse . Doppler de l’artère ombilicale (Doppler ombilical : DO) Il évalue les flux au niveau des artères ombilicales qui ramènent le sang désoxygéné au placenta. Physiopathologie En situation pathologique, le plus souvent dysgravidique, les résistances placentaires augmentent du fait de la présence de microthrombi et d’infarctus diffus. On observe alors une diminution anormale du flux diastolique ombilical, d’autant plus importante que les altérations placentaires sont étendues. L’augmentation de ces résistances dans l’artère ombilicale, mesurées au niveau du placenta, sont souvent dues à une pathologie gravidique complexe à point de départ placentaire. Dans les situations de RCIU, le DO nous donne une évaluation pronostique de la gravité car il renseigne directement sur l’état fœtal, c’est un marqueur fiable de souffrance fœtale chronique. Il est le reflet des résistances vasculaires placentaires et se trouve influencé par l’insuffisance placentaire et le RCIU. Une inversion du flux en diastole signe une souffrance fœtale grave avec acidose ou hypoxie. Après 26 SA, devant un DAU pathologique ou dans le cadre d’un ATCD de RCIU, un Doppler ombilical pathologique précède l’infléchissement des biométries fœtales. Il a donc un intérêt majeur pour différencier les petits poids pour l’âge gestationnel (PAG) constitutionnels à Doppler ombilical normal avec potentiel de croissance conservé, des fœtus à risque d’hypoxie chronique à Doppler ombilical pathologique. Enfin, il est essentiel dans la surveillance du bien-être fœtal dans le cadre des RCIU. Technique de mesure Le cordon est très facilement repéré en mode 2D puis avec le Doppler couleur (figure 7). L’insertion du cordon sur la plaque choriale est le site de mesure préférentiel car la mobilité du cordon y est moindre et les flux observés reflètent uniquement les résistances placentaires. Il existe une différence significative dans les indices Dopplers des artères ombilicales en fonction du site de mesure : au niveau de l’ombilic fœtal, du cordon libre et de l'extrémité placentaire du cordon. La résistance sera plus élevée au niveau de l’extrémité fœtale du cordon. En cas de grossesses multiples par contre, les enregistrements en intra-abdominale fœtal sont à privilégier afin d’éviter des erreurs d’identification de fœtus (figure 8). De plus, les mesures étant répétées dans le temps, la fiabilité comparative sera augmentée. Le spectre Doppler obtenu est de type basse résistance. Les deux artères ombilicales peuvent être explorées indifféremment. Pour avoir un spectre satisfaisant, il convient d’avoir un angle inférieur à 30° entre le flux de l’artère et l’axe de tir Doppler. Figure 7. Repérage des artères ombilicales au niveau de l’insertion placentaire en Doppler couleur. Figure 8. Repérage des artères ombilicales, en intra-abdominal dans le cadre d’une grossesse gémellaire, en Doppler couleur. Analyse du spectre Au cours de la grossesse, la résistance placentaire diminue progressivement et le flux diastolique ombilical augmente parallèlement. La mesure semi-quantitative de l’index de résistance ombilical IR est exprimée par le rapport (S-D)/S et diminue aussi progressivement au cours de la grossesse

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