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Le périnée féminin
Ina RAHZI, Bruno DEVAL - Département de chirurgie gynécologique fonctionnelle et oncologique, hôpital Privé Geoffroy Saint-Hilaire, Ramsay Santé, Paris

Le périnée est le plancher des organes pelviens. La vessie, le rectum, l’utérus et le tiers supérieur du vagin reposent sur le périnée. Croisée des chemins du gynécologue, du proctologue, du médecin rééducateur, du neurologue, de l’urologue, du sexologue, du kinésithérapeute, de l’ostéopathe, de la sage-femme, le périnée de la femme suit le méandre de plusieurs spécialités médicales.
Ce texte s’adresse aux médecins de notre discipline mais aussi aux médecins généralistes ou d’autres disciplines tant le périnée de la femme est le lieu de convergence d’horizons professionnels différents. Il est peut-être temps pour nous, gynécologues de France, de reprendre la main d’un pan de notre discipline que nous avons laissé à l’urologie. Souvenons-nous de Burch, père de la colposuspension, de Ulf Ulmsten, père de la TVT (Tension-free Vaginal Tape), de Raoul Palmer, père de la laparoscopie, de Jacques Huguier père de la sacrocolpopexie… Tous étaient gynécologues-chirurgiens mais avant tout gynécologues-obstétriciens. La semaine de l’incontinence parfaitement organisée voilà près de 20 ans par l’Association française d’urologie (AFU) a conduit les patientes souffrant d’incontinence urinaire (IU) à se diriger en première intention vers nos collègues urologues. Il s’agit d’une réalité française. En Europe centrale, les femmes souffrant de troubles pelvi-périnéaux sont prises en charge en première intention par les gynécologues ; aux États-Unis, en Océanie, en Asie, il semblerait que l’activité soit équitablement distribuée ; au Moyen-Orient, seuls les urologues sont habilités à traiter les femmes souffrant de troubles de la statique pelvi-périnéale. Une question est souvent posée par les organismes de presse : quel médecin consulter devant une IU de la femme ? Il est peut-être temps de reprendre le lead d’une discipline qui a été abandonnée ces 20 dernières années. Quelles solutions proposer ? • Par le volume de l’activité clinique en tout premier lieu, devenir incontournable protège des aléas de la concurrence. • Par la participation aux sociétés savantes internationales, nos gynécologues juniors doivent être membres de la IUGA (International Urogynecologic Association) et de l’ICS (International Continence Society), nos amis étrangers ne sont pas avares de critiques vis-à-vis de « Frenchies » au sympathique accent mais peu présents. • Par l’organisation de l’enseignement et par une meilleure définition des sous-spécialités de notre discipline. Nous étions quelques-uns à militer pour la création d’une discipline propre aux dysfonctionnements pelvi-périnéaux de la femme ; ces vœux de Bernard Jacquetin étaient dans les années 2000 restés lettre morte. • Création de stages validants, enseignements spécifiques aux troubles de la statique pelvi-périnéale, mobilité internationale dans des stages anglo-saxons sont des pistes. Enfin, quand va-t-on en finir avec cette mainmise de l’académisme hospitalier publique à la formation de nos internes ? Là encore, il convient de former nos jeunes internes – qui, de l’avis de tous, sont trop nombreux dans leurs services hospitaliers publics. La création de docteurs juniors doit permettre l’ouverture à l’universitarisation de structures privées prédéfinies. Nous nous battons depuis plusieurs années pour que les hôpitaux privés parisiens deviennent terrains de stage, c’est paraît-il aussi le vœu des jeunes spécialistes de notre discipline de venir voir et apprendre dans des secteurs d’activité libérale. Nous sommes encore et encore bloqués, comme du temps de notre ami Bernard Jacquetin. Que faut-il faire pour que nous soyons entendus ? Le conseil d’État pourrait être la solution ultime. Alors, de grâce, que cette main tendue depuis de longues années puisse enfin être prise en considération ! Il n’est pas trop tard, il n’est jamais trop tard. Ce texte sur le périnée de la femme est un bref résumé du livre qui vient d’être publié aux éditions du Rocher. Alex BETHOUX, père du colpocystogramme et attaché l’Hôpital Broca dans les années 1950 l’avait « pré-dit », le XXI e siècle sera celui du périnée de la femme. Donnons-lui raison. B. DEVA D’un point de vue fonctionnel, le périnée de la femme a plusieurs rôles. Il contrôle la continence urinaire et la miction mais aussi la continence anale et l’exonération ; il soutient les éléments pelviens (vessie, utérus, rectum) et participe au bien-être sexuel. De fait, le périnée doit être actif, travaillé, entretenu et surveillé. Il est le garant d’une vie soutenue, continente et sensuelle. Toute femme doit se l’approprier, accéder par son anatomie à ses fonctions, découvrir ses zones de faiblesses et ses points forts, savoir quand et qui consulter et quelles solutions trouver lorsque son périnée est en difficulté. Anatomie succinte du périnée de la femme Pour visualiser le périnée, dessinez un losange et tracez une ligne horizontale en son milieu. Deux triangles sont définis d’avant en arrière : le périnée antérieur – ou région uro-génitale – et le périnée postérieur – ou région anale. De la superficie à la profondeur, le périnée est organisé en 3 plans : le plan superficiel, le plan moyen et le plan profond. Le tout crée un hamac musculaire percé d’avant en arrière par 3 conduits : l’urètre relié à la vessie, le vagin relié à l’utérus et, enfin, le canal anal relié au rectum. Ces conduits s’ouvrent à l’extérieur par 3 orifices qui sont d’avant en arrière : le méat de l’urètre, le hiatus génital et l’anus. Le trajet suivi par l’urètre diffère chez la femme et chez l’homme. Il est de 4 cm de long (1), traverse le diaphragme uro-génital ; sa terminaison constitue le méat urinaire. A l’entrée du vagin se situe la membrane hyménéale, fin tissu constitué, plus ou moins souple, parfois mal formé ; 10 % des petites filles naissent sans hymen ; elles peuvent aussi présenter un hymen rigide, un hymen double, un hymen perforé de petits ou de grands trous, etc. L’hymen peut rester intact même chez une personne ayant eu des rapports sexuels, comme il peut ne plus y avoir d’hymen chez une personne vierge (du fait de la pose de tampons, de la pratique du vélo, d’un traumatisme). Deux glandes ouvrent leurs orifices à l’entrée du vagin et participent à sa lubrification : les glandes vestibulaires mineures para-urétrales de Skene et les glandes vestibulaires majeures de Bartholin situées dans le périnée superficiel (à 5 heures et 7 heures de l’entrée du vagin). Ces 2 glandes ont une forme ovale et ne dépassent pas un demi-centimètre. Elles sont reliées à des conduits s’ouvrant à hauteur de l’hymen, au niveau vaginal. Habituellement, les glandes de Bartholin disparaissent à la ménopause : toute masse dans cette zone, à cette période, est suspecte. Autre composant du périnée superficiel : le clitoris. Il est situé dans la vulve et recouvert par les grandes lèvres. Il n’est pas réduit au petit bouton au-dessus de la vulve, tel un iceberg. Le clitoris est aussi composé d’une partie enfouie constituée d’un corps avec 2 piliers et 2 bulbes (complexe bulbo-clitoridien). Le gland est la seule partie visible du clitoris. Il est recouvert du capuchon, un repli cutané qui dépend des petites lèvres. La taille du gland avoisine le demi-centimètre. Dans le prolongement du gland se situe le corps du clitoris qui va se couder et dessiner un genou. Un ligament maintient le corps suspendu à la symphyse pubienne, le ligament suspenseur du clitoris. Lors de l’excitation, sous l’effet de l’afflux de sang, le corps du clitoris augmente de volume et durcit, mais ne se redresse pas comme le pénis. Les piliers sont constitués de cavités (comme dans le pénis, les corps caverneux se remplissent de sang lors de l’excitation). Des muscles permettent de chasser le sang en direction du corps du clitoris augmentant son volume. Sur le versant postérieur, cette fois-ci, le rectum fait partie de l’appareil gastro-intestinal tout comme le canal anal. Il est à noter que la partie terminale du côlon sigmoïde se situe également dans la cavité́ pelvienne. Le canal anal s’abouche au périnée par l’anus. Lorsque celui-ci traverse le périnée et le diaphragme pelvien, il est entouré́ sur toute sa longueur des sphincters externe et interne qui maintiennent l’anus ferme (́2). Périnée, grossesse et accouchement La présence du futur nouveau-né dans l’utérus maternel entraîne une augmentation de la pression abdominale et des contraintes musculaires, osseuses et ligamentaires. La pression habituellement dirigée vers le coccyx en arrière se déplace en avant et pousse vers le périnée. Le hamac musculaire du périnée est alors soumis à rude épreuve. Il se tend et se distend. En cours de grossesse, la future mère peut souffrir de fuites urinaires lors d’un effort ou parce qu’elle ne parvient pas à se retenir (1 femme sur 3 en souffre à cette période) Fin de grossesse : rééducation quotidienne et automassage Plus l’enfant est bas, plus les muscles du périnée superficiel et profond s’amincissent. Le hamac musculaire périnéal diminue des deux tiers de son volume et passe de 46 cm3 à 13 cm3. Il est de fait moins résistant et devra être renforcé par des séances de rééducation à partir de la 34 e semaine de grossesse (8 mois) mais aussi par une autorééducation quotidienne. Quant à la pression abdominale, elle doit être déviée ou déplacée vers une zone de moindre risque. Cette pression ne doit plus s’exercer vers le bas. C’est à ce moment que la souplesse du diaphragme thoracique revêt une importance considérable. Il faut faire en sorte d’aspirer le futur nouveauné vers le haut par des mouvements d’expiration profonde et privilégier la position assise ou couchée. En fin de grossesse, l’automassage est primordial. Il peut être réalisé à partir de la 34e semaine de grossesse (8 mois et demi), 5 à 10 minutes par jour. Il doit être réalisé avec le pouce (face palmaire) au contact de la fourchette postérieure de la vulve. Les mouvements en forme de U doivent être appuyés et lents, ils préparent les tissus à l’accouchement. Ce massage au quotidien est efficace puisqu’il diminue la fréquence des épisiotomies et des déchirures périnéales lors de l’expulsion du nouveau-né, il préserve de l’inconfort d’un périnée cicatriciel. Pour le massage périnéal, il est conseillé d
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